D’une rive à l’autre, les plumes ancrées dans l’encre hexagonale épatent leurs lecteurs potentiels durant la rentrée littéraire française qui bat en ce moment son plein. Sans aborder le sujet de l’effroyable guerre d’Algérie, les deux écrivains francophones de nationalité algérienne : Kamel Daoud et Kaouther Adimi, par le prisme de leurs héros atypiques, dressent le portrait d’une nouvelle Algérie qui, hélas, ne lit plus.
Kamel Daoud “Zabor ou les psaumes”
Après Meursault, contre enquête, l’auréolé du Goncourt du premier roman en 2015, Kamel Daoud publie en 2017 chez ’’Barzakh’’ en Algérie, ‘’Actes sud’’ en France et ‘’Cérès Editions’’ en Tunisie Zabor ou les psaumes. Ce roman, disponible aussi bien dans son format papier que dans le format numérique, a déjà décroché le Prix Transfuge du meilleur roman de langue française 2017.
Après la mise en scène de Haroun qui relate le récit de son frère Moussa (personnages de Meursault contre enquête), nous lisons cette fois-ci le récit de Zabor, l’enfant sage et mystérieux ayant grandi « à l’écart de son village, aux portes du désert, dormant le jour, errant la nuit ». Ces interférences littéraires, culturelles, historiques et même religieuses dotent l’écriture de Kamel Daoud d’un esthétisme (ou mysticisme ?) qu’on ne voit nullement ailleurs. Cette technique a été, certes, instaurée par Salim Bachi qui a publié un tas de roman durant la précédente décennie, mais Kamel Daoud semble prendre le relais et avancer à un rythme sans égal.
Kaouther Adimi “Nos richesse”
La jeune algéroise qui a quitté La Blanche juste après la publication de son premier roman Des ballerines de papicha chez Barzakh en 2010, a réussi à se frayer un chemin vers la notoriété internationale. En 2011, elle réédite son premier roman chez Actes Sud sous le titre L’envers des autres mais le contenu reste, plus ou moins, intact. Après 4 ans d’abstention, son deuxième roman Des pierres dans ma poche bénéficie d’une double édition. Publié d’abord aux éditions du Seuil en 2015, Barzakh se charge de sa réédition. Un récit qui a insufflé un nouvel air à la littérature algérienne et a marqué un point positif dans la biographie de sa jeune auteure. Une amélioration de son style qui devient plus fluide et également plus littéraire y a été repérée.
Pour la rentrée littéraire 2017, elle publie Nos richesses aux éditions du Seuil et chez Barzakh qui a parrainé ses deux opus. Roman qui, dès la première semaine de sa mise en vente, a été retenu pour la première sélection des prix : Goncourt et Renaudot.
Alice Zeniter ” L’Art de perdre”
A l’autre rive de la méditerranée, Alice Zeniter, petite-fille de harki, publie chez Flammarion son cinquième roman. Elle y raconte la culpabilité de ceux qui, pour des raisons purement pragmatiques, se sont rangés du côté de la France lors de la guerre d’Algérie. N’ayant comme héritage identitaire qu’un nom de famille, cette jeune auteure française d’origine algérienne fait le récit des siens, ces prisonniers d’un passé qui les piétine, ronge, torture et condamne à perpétuité. Roman qui lui vaut le Prix littéraire Le Monde et le Prix des Libraires de Nancy.
Karim Amellal ” Leur pays retrouvé”
Co-fondateur du collectif d’écrivains et d’artistes Qui fait la France?, enseignant à Science-Po Paris, entrepreneur et auteur de Cités à comparaître roman publié chez Stock en 2006 et de Blanc Bleu Noir paru aux éditions de l’Aube en 2016, Karim Amellal confie son troisième roman Leur pays retrouvé aux éditions de l’Aube. Dans ce roman, l’écrivain Franco-algérien, né à Paris en 1978, scolarisé en Algérie à Alexandre Dumas-Ben Aknoun, puis établi en France dès l’âge de dix ans, raconte l’état d’âme des vieux algériens rentrés enfin chez eux après avoir passé maintes années en France. Ce récit décrit le malaise et le chagrin qu’ils éprouvent quand ils affrontent l’amère réalité d’une Algérie qui ne garde de son identité que les noms des ruelles.
Ce roman, contrairement à ce qui était prévu, ne sera pas présent au 22ème Salon International du Livre d’Alger 2017 qui se déroulera au Palais des Expositions comme chaque année. Laura Imbert, l’assistante de communication des éditions de l’Aube déclare : « Cette publication a pris du retard et a dû être décalée » et s’excuse en enchaînant : « pour l’instant, nous n’avons pas de date de publication » alors que le manuscrit ainsi que la quatrième de couverture sont bel et bien prêts.